Ensemble contre la Cardiomyopathie – Clémence Gualy
Bonjour les amis !
La semaine passée Clémence Gualy nous parlait de son défi contre la cardiomyopathie et souhaite aujourd’hui nous faire découvrir davantage cette maladie au travers d’une interview qu’elle nous invite à découvrir :
- Tout d’abord, pourriez-vous nous en dire plus sur vous ?
Bonjour. Je m’appelle Clémence Gualy, j’ai 27 ans, et je suis née prématurément à 7 mois, le 13 mars 1995, avec une maladie génétique assez rare dite « la Cardiomyopathie Hypertrophique », qualifiée aussi d’obstructive. Une anomalie du gène MYH7 ( codant pour la chaîne lourde de la myosine) et du gène MYBPC3 ( protéine musculaire exprimée dans le myocarde, située sur le chromosome 11) détectée chez moi, en est à l’origine. Ma Cardiomyopathie Hypertrophique a été mise en évidence en période néonatale immédiate, suite à une détresse respiratoire sur hypertension artérielle pulmonaire, transitoire, motivant 8 jours de ventilation assistée conventionnelle. Bien que les médecins pensaient au départ que l’hypertrophie de mon muscle cardiaque était due au diabète gestationnel de ma mère, la confirmation de ma pathologie cardiaque, fut assez simple et rapide, après une échographie cardiaque et un test génétique. Je vis auprès de ma famille, avec laquelle je m’entend très bien. Je viens de terminer mes études en Philosophie, je fais du sport en loisir (natation) et je milite avec l’Association de Cardiologie Languedoc-Roussillon, partenaire de la Fédération Française de Cardiologie, pour venir en aide aux personnes atteintes de Cardiomyopathies et d’Insuffisance Cardiaque.
Il faut savoir que la « Cardiomyopathie Hypertrophique » est une maladie du muscle cardiaque, avec comme principale caractéristique un épaississement anormalement excessif ( hypertrophie) de la paroi du ventricule gauche. Il est le plus souvent situé au niveau du septum ( c’est à dire la cloison qui sépare le ventricule gauche et le ventricule droit ). Plus rarement l’hypertrophie peut se situer à l’apex ( la pointe du ventricule). On parle parfois de « Cardiomyopathie Hypertrophique Obstructive », lorsque l’épaississement au niveau du septum est très important, et par conséquent gène l’éjection du sang du ventricule gauche vers l’aorte. Cette maladie touche environ 1/250 à 1/500 personnes dans la population générale. Il s’agit d’une maladie génétique transmissible sur un mode autosomique dominant. Cela signifie donc, qu’elle peut être transmise à la descendance avec un risque de 50 % équivalent chez les filles et les garçons. Le diagnostic est le plus souvent porté chez l’adolescent ou le jeune adulte, mais parfois plus tard car elle n’est pas toujours responsable de symptômes. Me concernant, je suis la seule dans ma famille à avoir une forme très sévère de la maladie et découverte dés ma naissance. Ma mère ainsi que ma sœur âgée à présent de 34 ans, ont uniquement l’anomalie sur le gène de la «CMH», sans pour autant avoir développé la maladie. Enfin, elle peut être bénigne et être associée à une espérance de vie normale. Mais elle peut aussi connaître diverses évolutions : Mort Subite (risque à évaluer au cas par cas), Insuffisance Cardiaque, Fibrillation Auriculaire et Accident Vasculaire Cérébral. En savoir plus sur la Cardiomyopathie Hypertrophique : https://youtu.be/Uw7muXnJaMs |
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Vous avez été diagnostiquée très jeune, mais les premiers symptômes sont arrivés à l’adolescence. Quels étaient ces symptômes ?
Oui, tout à fait. Régulièrement suivie par les cardiologues depuis la naissance, avec traitement par Bêtabloquants dès le plus jeune âge, c’est seulement à quinze ans, que sont apparus les premiers symptômes de la maladie, au cours d’une séance de volley (palpitations extrêmes, asthénie, dyspnée d’effort, douleurs dans la poitrine, voile noir devant les yeux, fibrillation auriculaire). C’est à ce moment-là, en pleine adolescence donc, et allongée sur le sol, que j’ai compris la gravité de ma pathologie cardiaque et qu’il fallait agir vite. J’étais à la fois anxieuse à l’idée peut être de mourir, mais à la fois sereine, car j’étais entourée par ma classe et les professeurs d’éducation physique et sportive. La directrice de mon collège François Mitterrand, à Clapiers, a tout de suite appelé le Samu et les secours m’ont transportée d’urgence au CHU Arnaud de Villeneuve à Montpellier.
Dans mon cas, la paroi séparant le ventricule gauche du ventricule droit «le Septum», était beaucoup plus épaisse que la normale; grossissant au fil du temps, le risque était un obstacle à l’éjection du sang. Étant donné l’ampleur de l’hypertrophie septale très importante chez moi ( 33 mm ), avec obstruction symptomatique, une opération lourde, rare et délicate, à cœur ouvert, fut nécessaire, sous CEC (circulation extracorporelle) : « la Myectomie Septale ». Il s’agit d’un traitement invasif afin de retirer une partie du muscle cardiaque responsable de l’obstruction. Après une longue préparation au CHU de Montpellier, à travers différentes procédures : ( coroscanners, bilans biologiques, biopsies cardiaques, cathétérismes cardiaques, radiographies du thorax, IRM cardiaques, échographies cardiaques d’efforts, électrocardiogrammes) , l’intervention aura duré environ douze longues heures (de 9h du matin jusqu’à 21h le soir) à l’hôpital de La Timone à Marseille. Sortie du bloc opératoire avec implantation d’un défibrillateur, à titre préventif, et d’un pacemaker que je conserverai pour remédier à un bloc auriculo-ventriculaire complet, toujours risqué après ce type d’intervention. Le Pacemaker (ou stimulateur cardiaque ou « pile ») est un dispositif implanté dans l’organisme, qui fournit des impulsions électriques, destinées à stimuler le cœur. Il est utile parfois dans le traitement des bradycardies cardiaques , mais également dans mon cas, pour pallier à un bloc auriculo-ventriculaire complet. Le bloc auriculo-ventriculaire complet, ne vous est certainement pas très familier… Je vous rassure ! j’en avais strictement aucune idée avant que les cardiologues me l’expliquent . C’est l’une des complications possibles de la Myectomie Septale, une altération de la transmission de l’influx électrique, interrompue ou ralentie, entre les oreillettes et les ventricules. Quant au défibrillateur automatique implantable (DAI) c’est un petit dispositif implanté sous la peau qui détecte et corrige les anomalies de l’activité électrique du cœur potentiellement dangereuses, pouvant conduire à la mort subite. Lorsque le défibrillateur détecte une tachycardie ventriculaire (battements de cœur trop rapides), il envoie une série d’impulsions rapides, voire une décharge électrique au cœur afin de rétablir rapidement une fréquence et surtout un rythme cardiaque adéquate. La Cardiomyopathie Hypertrophique représente l’une des causes majeures de la mort subite chez les jeunes de moins de quarante ans, et tout le monde n’a pas la chance d’avoir un ange gardien au quotidien : « le défibrillateur implantable ». C’est pourquoi , si aucun soin n’est pratiqué dans les minutes qui suivent un arrêt cardiaque, les chances de survie sont très réduites. Fort heureusement, vos mains, comme les miennes, peuvent changer le cours des choses. Celle ou celui qui en prend conscience, augmente sa puissance d’agir. Pour cela, trois gestes comptes : 1) Appeler le Samu Les mains sont comme les ailes d’un ange. Elles sont protectrices. |
- Quelles ont été les suites de l’opération ?
Mon opération s’est bien déroulée, j’ai cependant été perturbée huit jours après par une endocardite sévère sur sondes et boîtiers, ( pacemaker-défibrillateur ) infectés par une bactérie «Pyocyanique». Il y a eu donc nécessité d’un retrait des stimulateurs, réimplantation d’un autre pacemaker dans la paroi sous-ventrale, puis administration pendant six semaines d’un antibiotique puissant dans un service de rééducation du cœur à Hyères. Enfin, séjour postopératoire à nouveau sur Montpellier. On ne savait pas si j’allais pouvoir remarcher un jour, ni assurer l’indispensable du quotidien ; mais grâce à la volonté et à force d’y croire, j’y suis parvenue et, depuis je mène une vie presque normale, même si la maladie reste sans traitement curatif totalement en soi.
Au cours de ces épreuves et devant l’inquiétude de mes parents, proches, amis et médecins, j’ai toujours gardé un bon moral et j’ai continuellement eu un relationnel des plus étroit, voire même affectif avec toutes les équipes médicales., sentiments toujours présents aujourd’hui. -Un bon relationnel entre le patient et le soignant est capital. Un préalable aux soins. Il améliore considérablement la situation et facilite la prise en charge ainsi que le diagnostic. -Avoir de petites attentions, des paroles apaisantes, tenir de temps en temps la main du patient lors des soins, mettre de la musique, laisser la porte de sa chambre ouverte pour qu’il ne se sente pas coupé du monde extérieur, peut paraître insignifiant et pourtant appréciable. – Expliquer attentivement chaque soin au patient, prendre le temps de lui faire comprendre sa maladie, sans rien lui cacher, permet de le rendre responsable de son combat. – Enfin, la transition ado/adulte, toujours délicate, voire anxiogène, permet une continuité des soins et un suivi régulier. |
Aujourd’hui, pour moi, sont apparus récemment des troubles au niveau du rythme cardiaque : tachycardies ventriculaires ( non soutenues), tachycardies supraventriculaires, avec des extrasystoles ventriculaires, à l’effort, me procurant parfois des malaises lipothymiques ( essoufflement, pâleur, ramollissement des jambes, sueurs) et des syncopes ( pertes de connaissance soudaines et temporaires). Cela entraîne une certaine appréhension, sachant que le risque de reprise interventionnelle de l’hypertrophie du muscle cardiaque n’est pas écarté. Cette situation m’a poussée à accepter les conseils de mes cardiologues et la pose à nouveau d’un ange gardien au quotidien, dont un défibrillateur le 02/04/2021. Vous comprendrez, que préserver sa santé, aider cet organe essentiel à la vie, que je nomme être « la lampe du corps », est évident et primordial. La Cardiomyopathie Hypertrophique est une maladie variablement évolutive, coriace, avec parfois, et c’est mon cas, des parois très épaisses et rigides, avec une fibrose myocardique progressive, m’ayant conduit à une Insuffisance Cardiaque dite « à fraction d’éjection préservée » et à des anomalies du rythme cardiaque . L’ Insuffisance Cardiaque est une incapacité du cœur à pomper suffisamment de sang pour répondre aux besoins de l’organisme. C’est un problème de santé grave et pouvant être mortel. Elle se révèle par des symptômes que l’on peut regrouper sous l’acronyme E.P.O.F : Essoufflement, Prise de poids, Oedèmes, Fatigue. N’attendons pas de ressentir ces symptômes pour agir !!!!!!! Adoptons dans notre quotidien l’acronyme E.P.O.N : Exercice, Prendre son poids, Observance, Ne pas saler. |
Pour visualiser ma vidéo sur l’Insuffisance Cardiaque et la Cardiomyopathie :
- Quelle approche philosophique faites-vous de la maladie ?
La maladie est souvent un long combat que l’on se doit d’apprivoiser si l’on souhaite avancer. Elle participe à notre mode de vie, chaque jour elle nous parle et nous invite à lui répondre positivement ; renoncer à ce dialogue, c’est se laisser mourir. La maladie n’est évidemment pas bonne en elle-même. C’est l’approche que nous nous en faisons qui doit être avant tout, bonne. Atteinte d’une pathologie grave, vivre, c’est choisir entre la soumission ou la volonté de la dominer. Spinoza disait de la joie : « c’est le passage de l’homme d’une moindre perfection à une plus grande perfection ». La perfection augmente quand la puissance d’agir augmente elle même. Pour limiter et soulager les symptômes liés à mon Insuffisance Cardiaque, je suis impérativement les recommandations de mon cardiologue, sous l’acronyme E.P.O.N : Exercice, Prendre son poids, Observance, Ne pas saler. Comme le disait le Philosophe Sénèque : « Hâte-toi de bien vivre et songe que chaque jour est à lui seul une vie ». Je pratique de la natation régulièrement et de façon modérée, cela me permet de me maintenir en forme, de renforcer mon cœur, de lutter contre la fatigue et contribue ainsi à mon épanouissement et à la confiance en soi. J’essaye également de maintenir un poids raisonnable afin d’être moins essoufflée. Je ne fume pas et je ne bois pas d’alcool. Je vois régulièrement mon cardiologue pour réaliser des contrôles médicaux et lorsque j’en ressens le besoin. Ainsi, combattre pour vivre mieux, m’encourage et me procure une certaine satisfaction ; surmonter les symptômes de la maladie au profit, malgré tout, d’une qualité de vie aussi bien que possible, est un but à atteindre. Ce n’est pas toujours facile d’y parvenir, seule la volonté y contribuera.
- Êtes-vous soutenue par votre famille, vos amis, vos cardiologues ?
L’amour des uns et des autres que l’on me porte, m’aide et me guide dans mes choix de la vie et bien entendu dans le combat que je mène depuis ma plus tendre enfance contre la Cardiomyopathie; croyez-moi, il est un antidote précieux, il peut nous aider à surmonter bien des épreuves…
- Quel(s) conseil(s) aimeriez-vous donner aux patients également atteints de Cardiomyopathie ?
A celles et à ceux qui sont atteints de cette pathologie, ne jamais renoncer à se battre et de toujours garder espoir.
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Pourriez-vous nous faire découvrir les paroles de la chanson que vous avez écris pour sensibiliser à la Cardiomyopathie ?
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Pourriez-vous nous faire découvrir le poème que vous avez écris pour sensibiliser à la Cardiomyopathie ?
Mon cœur éléphant Depuis enfant
J’ai le cœur éléphant
S’hypertrophiant drôlement
Il crée l’étonnement
Maladie transmissible génétiquement
Sur un mode autosomique dominant
On croit qu’il grandit fièrement
Pourtant, il se fatigue au fil du temps
Dieu que c’est terrifiant
Ma vie en dépend
Travaillant durement
Il peine assurément
Maudit châtiment
Le sortilège est accablant
Son pompage insuffisant
Rend mon corps défaillant
Essoufflement , Épuisement
Symptômes prédominants
La stupeur s’élève au firmament
Lorsque le danger s’en ressent
Bombe à retardement
Combattre est méritant
Place au changement
Vers un destin incandescentClémence Gualy.
- Pourquoi avez-vous réalisé un défi de 15 km à la nage le 18 juin 2022 ?
J’ai souhaité montrer à la Cardiomyopathie là où celle-ci semble être la plus redoutable « en pleine mer », que je n’avais pas peur d’elle et qu’elle n’aura pas le dernier mot, mais aussi pour pouvoir sensibiliser sur cette maladie grave, peu connue, et encore incurable de nos jours, et récolter des fonds pour que les chercheurs puissent trouver un traitement adéquat, améliorer le bien être des personnes qui souffrent comme moi de Cardiomyopathie et d’Insuffisance Cardiaque. C’est pourquoi Samedi 18 juin 2022, en compagnie de mes deux « guides », nageurs de l’extrême, Ludivine Blanc et Jacques Tuset, j’ai réalisé plusieurs kms à la nage, soit 5 km à la nage ce qui corresponds en eau libre à un semi-marathon de course à pieds et en relais sur un parcours total de 15 km à la nage, en partant depuis 9h du matin au point zéro de la plage de la Grande-Motte pour relier vers 15h l’Institut St Pierre de Palavas les Flots, là ou j’ai a été suivie depuis ma plus tendre enfance. Un exploit largement admiré, reconnu et applaudi par tous, en sachant que je souffre d’une forme sévère de la Cardiomyopathie et que j’ai été opérée à l’âge de 15 ans d’une myectomie cardiaque qui a nécessité 12h d’intervention pour cause d’une cardiomyopathie hypertrophique devenue obstructive, « cela consiste à retirer une partie du muscle cardiaque responsable de l’obstruction ». Et que je suis équipée également d’un défibrillateur implantable avec la fonction pacemaker intégrée et que j’ai évoluée récemment vers une Insuffisance Cardiaque progressive.
- Comment est-il possible de vous soutenir avec l’ Association de Cardiologie Languedoc-Roussillon qui est partenaire de la Fédération Française de Cardiologie) ?
Pour soutenir il suffit de se rendre sur le lien et de faire un don : https://donner.fedecardio.org/b/mon-don?cid=252&_cv=1 ou bien de faire un don par chèque à l’ordre de la FFC accompagné d’un petit mot « pour soutenir Clémence Gualy et les personnes atteintes de Cardiomyopathie/ Insuffisance Cardiaque », et l’envoyer à l’adresse suivante : ACLR, 39 rue François d’Orbay, 34080 Montpellier.
Pour plus d’informations :
Les Maladies Cardiaques Héréditaires et les Bienfaits Cardiologiques des Sports Nautiques
https://www.facebook.com/clemence.gualy/
L’ensemble de l’interview (textes / images / liens / documentations) est apporté par Clémence Gualy.